Les bâtiments intelligents changent l’industrie de la construction. Grâce aux différentes technologies numériques, notamment l’Internet des objets, les bâtiments deviennent aujourd’hui de véritables plateformes de services, au bénéfice des utilisateurs et des opérateurs. Au-delà de l’aspect technologique, certains usages peuvent être significatifs pour la réduction de nos consommations d’énergie.
Pendant plusieurs années, les matériaux et les méthodes de construction font l’objet des principales innovations. Aujourd’hui, avec la démocratisation du numérique, les bâtiments accueillent de plus en plus de technologies au point de parler désormais de bâtiment intelligent ou Smart Building.
Afin de simplifier les tâches du quotidien des usagers comme des gestionnaires, les bureaux, les centres commerciaux ou des sites de production sont maintenant équipés de plateformes proposant plusieurs services. Ils permettent de monitorer de façon intelligente l’entretien des équipements, la consommation énergétique, l’occupation des lieux ou encore les interventions des prestataires.
Il est aujourd’hui essentiel d’équiper les bâtiments d’infrastructures numériques pour pouvoir collecter des données réelles sur la consommation d’énergie. Notamment les passoires thermiques car la simple visualisation de la consommation associée au monitoring minimaliste permet déjà de réaliser rapidement des économies d’énergie allant jusqu’à 20 %, voire 30 % selon Smart Buildings Alliance. En plus de ces économies, la collecte et la connaissance des données de tous les bâtiments existants sera utile au propriétaire pour décider des investissements qu’il doit faire en toute connaissance de cause.
Le Smart Building, qu’est-ce que c’est ?
C’est un concept qui intègre des solutions actives et passives afin d’optimiser la gestion énergétique qui vise à optimiser la consommation sans omettre le confort et la sécurité des occupants du bâtiment tout en respectant les normes en vigueur.
Tout commence avec le Building Information Modeling (BIM), un moyen de convergence de la créativité, de l’analyse, de la communication et de la production. Le BIM est un processus de conception et de gestion des données concernant une construction en liaison avec les infrastructures et qui prend en compte tout son cycle de vie. C’est une maquette numérique qui représente virtuellement le bâtiment physique.
Le BIM est partagé avec toutes les parties prenantes et modélise le fonctionnement d’une structure avant même qu’elle ne soit construite. Le bâtiment devient ainsi un ensemble de services voués à évoluer et à s’enrichir au fur et à mesure pour favoriser le confort de ses occupants et n’est plus une structure figée.
Le BIM permet de suivre efficacement les avancées d’un projet car toutes les saisies dans la maquette sont complétées et synchronisées en temps réel. Cela permet d’éviter les imprévus et les blocages. Il est désormais une nouvelle manière de travailler et de communiquer entre les acteurs d’un projet et de prévoir les besoins liés à l’exploitation ainsi que les besoins des futurs occupants. L’injonction qui s’impose actuellement est celle de « bâtir intelligemment et mieux ».
Pour pouvoir continuer à gérer automatiquement l’exploitation du bâtiment avec la maquette 3D du BIM après sa livraison, il est nécessaire de connecter le bâtiment en l’équipant de capteurs. Les capteurs servent à superviser en temps réel via des systèmes intelligents l’état du bâtiment : l’état des équipements, la température des locaux, les diagnostics des performances, la consommation d’énergie… Grâce à l’Internet des Objets (IoT) et l’intelligence artificielle, certaines actions peuvent être automatisées de sorte que les bâtiments soient le plus autonomes possible.
Les cas d’usage pour les Smart Buildings
Les premiers bénéficiaires des bâtiments intelligents ont été les utilisateurs, c’est-à-dire ceux qui vivent ou travaillent dans ces smart buildings connectés. Il s’agissait d’abord du secteur tertiaire dans la plupart des cas mais le bâtiment intelligent s’étend maintenant pour concerner également les hôpitaux, les installations industrielles et les logements collectifs.
Les smart buildings sont dotés de technologies permettant de prévoir les aléas du quotidien avant même qu’il n’ait lieu, ce qui contribuent fortement au confort des habitants ou employés tout en réduisant la consommation d’énergie. Par la même action, les bâtiments intelligents offrent également aux entreprises de nombreuses opportunités de réduction des coûts d’exploitation.
Dans un sens plus large, l’usage des smart buildings nous mène à repenser les usages des villes et des immeubles qui les composent, ce qui représente une priorité, d’autant que la vacance dans ces derniers a explosé ces derniers mois. Il s’agit donc désormais d’envisager des usages plus intelligents, plus polyvalents et partagés pour répondre aux nouveaux besoins des habitants. Cela passe par exemple par des espaces communs de télétravail à l’échelle du bâtiment ou du quartier pour limiter les déplacements tout en favorisant le lien social.
La modularité de cet usage et la réversibilité du parc existant – qu’il soit résidentiel, de bureaux, logistique, tertiaire ou de loisirs – profitera à tous : aux utilisateurs, avec un accès supplémentaire à des espaces de vie sans avoir à acheter un logement plus grand, ainsi qu’aux promoteurs qui, par une gestion plus itérative, maintiendront des marges satisfaisantes tout en continuant à réduire durablement l’empreinte carbone du bâtiment tout au long de son cycle de vie.
Les bâtiments intelligents peuvent être appliqués à plus grande échelle : smart grids ou réseaux intelligents qui relient ensuite les bâtiments entre eux et à leur environnement, comme la gestion de la distribution d’énergie à l’échelle d’un territoire. Dans certains cas, le même service peut être déployé dans une ville, au profit de communautés entières. Ces « villes intelligentes » ou « smart cities » gèrent les parkings, les réseaux d’eau ou l’éclairage public de manière intelligente et automatisée.
Des technologies puissantes et indissociables du concept de bâtiments intelligents occuperont une place centrale dans la transition écologique, perfectionnant et apportant une valeur ajoutée aux bâtiments du concept au cycle de vie complet. Ces technologies adaptent et éteignent automatiquement l’éclairage, réduisent le chauffage le cas échéant, etc. Avec les capteurs intelligents et les objets connectés (IoT), des bâtiments privés et publics bien équipés collaborent déjà avec les énergéticiens et les villes pour collecter les données nécessaires à la prévision et à l’optimisation de la consommation d’énergie. Dans quel but ? Économiser les matières premières, réduire l’empreinte environnementale et les dépenses énergétiques. Par exemple, le projet Smart Electric Lyon porté par EDF qui permet aux utilisateurs d’être acteurs de leurs consommations énergétiques à réaliser 30% d’économie d’énergie par les expérimentateurs tertiaires et entreprises.
Cependant, tout cela soulève deux questions. Premièrement, à une époque où les solutions et outils connectés se développent à une vitesse folle, l’utilisation de la domotique et des objets connectés doit se conformer à une logique de consommation énergétique saine pour éviter que cela ne soit contre-productif. Certaines technologies et gadgets sont particulièrement énergivores et difficiles à recycler. Par ailleurs, malgré ses bénéfices immédiats et évidents, l’exploitation des données reste une source d’inquiétude, de réticence voire d’opposition explicite. Ainsi, pour impliquer chaque usager dans la transformation des bâtiments et des villes, un travail de pédagogie et de démystification reste à faire, qui ne peut être mené efficacement sans le soutien de l’État. D’autre part, il faut également s’assurer que les collecteurs de données en font un bon usage. Certains comportements d’écoute permanente des systèmes domotiques Amazon et Google ont inquiété, à raison, sur l’usage fait de ces données. Le travail de protection des données personnelles mené en Europe avec le RGPD permet ainsi de rassurer sur le traitement fait des données collectées.
L’intelligence artificielle au service des Smart Buildings
Avec l’IA, le bâtiment gagne un cerveau ! Il demande une compréhension des usages et peut éventuellement les anticiper dans le but de proposer de nouveaux réglages à travers l’intégration de nombreuses datas, ce qui n’est pas possible pour le gestionnaire ou l’occupant.
L’intelligence artificielle a des domaines d’application très larges et, à l’heure actuelle, elle s’étend à des domaines plus pratiques tels que la construction. Les acteurs de la construction impliqués dans la transition écologique peuvent utiliser l’IA comme levier structurel des bâtiments et comme plateforme de services permettant le regroupement de différentes technologies à l’échelle de l’îlot, du quartier et même de la ville.
Grâce à la collecte et l’exploitation des données, l’IA comprend les usages des utilisateurs d’un bâtiment, les anticipe et propose de nouveaux modes de réglages. Cette intelligence du bâtiment est maintenant possible de par sa connectivité qui en fait en réalité une plateforme de services. Le traitement des datas extérieures comme la météorologie et l’énergie, les données liées au bâtiment dans le BIM, l’analyse de l’inertie des matériaux par exemple ou les informations relatives au comportement des occupants permettent le réglage des systèmes afin d’optimiser le confort attendu.
L’IoT dans les bâtiments intelligents peut optimiser la gestion de l’énergie en maximisant par exemple l’autoconsommation de la production d’énergie locale provenant de sources renouvelables et en autorisant l’interopérabilité entre les appareils et les systèmes. C’est pour ces raisons que l’UE soutient et finance de multiples projets comme TABEDE (TowArds Building Ready for Demand Response), un mécanisme d’extension de système de gestion de bâtiment à faible coût ou encore le projet RESPOND avec sa solution collaborative de gestion de la demande d’énergie permettant de faire correspondre l’offre en énergie et la demande.
Les bâtiments de demain doivent être prêts à être équipés de systèmes intelligents et connectés. Les services qui existent aujourd’hui ne cesseront d’évoluer et de nouvelles fonctionnalités émergeront et changeront notre façon de travailler et surtout de vivre.
Chargée de Marketing Digital chez Altaroad, je prépare une thèse professionnelle sur la transition digitale dans le secteur du BTP et spécifiquement dans la traçabilité des déchets de chantiers. Dans cette série d’articles, vous trouverez des actualités, les enjeux liés au secteur, les problématiques… À travers ma thèse, je souhaiterais trouver des réponses à plusieurs questionnements : Pourquoi le BTP a-t-il résisté si longtemps à la transition digitale ? Qu’est-ce qui change actuellement et qui permet l’explosion des investissements dans la “contech” ? Suivons cela de près !